samedi 25 février 2012

Osons parler d'argent... Acte 1.


En France, parler d'argent n'est jamais facile. Parler du prix du vin encore moins... C'est pourtant, invariablement, la première question que l'on vous pose lorsque l'on apprend que vous fréquentez des vignerons:
"Ah... Tu as un blog sur le vin ? Alors tu as sûrement des adresses pour trouver de bons petits vins, pas chers".
A l'annonce du prix, immanquablement, suit un petit sourire crispé et ce commentaire :
"Ah, tout de même..."
C'est qu'il n'est pas de concept plus éloigné de l'univers des vignerons-indépendants que celui, précisément, du "bon petit vin pas cher". J'étais donc bien déterminé à explorer le sujet.

Première expérience à Noël dernier avec trois de mes amis. C'était une journée superbe, comme l'hiver sait en réserver dans ce coin du Languedoc : froide mais lumineuse.

Nous étions attablés dans la cuisine d'une petite maison de village des Hautes Corbières, chez Maxime Magnon. Une maison toute simple, chaleureuse, habitée. Derrière le bar rouge et bois, notre hôte était occupé à préparer des pâtes au pistou. Aller-retour de l'assiette aux fourneaux... Conversations à eclipse... Maxime avait posé sous le nez de Jean-Baptiste et Frédéric un beau morceau de pâté de tête et quelques bruscettas.

Sur la table un Collioure bio à l'étiquette bariolée et la cuvée "Laïs" d'Olivier Pithon. Et puis une "Bégou", entamée au milieu des fûts... Un "Jadis" de chez Barral ne tarderait pas à suivre. Toute la matinée, Maxime nous avait fait faire, dans un vieux 4x4, le tour de ses vignes, de ses brebis et de son chenillard. Intarissables, les trois hommes comparaient à présent les cuvées de leurs amis, m'emmenant à la découverte de leurs vins après m'avoir guidé sur les chemins escarpés des vignes de montagne.

Nous parlions de tout, donc... Sauf d'argent.

Tabou ? Un détail qui ne trompe pas en tout cas : sur les sites des "auteurs de vin" les plus courus vous trouverez rarement les tarifs, tout au plus la liste des distributeurs. Comme si il était vulgaire de demander le prix. Comme si l'argent, lorsqu'il s'agit de vin et donc de plaisir (un plaisir parfois immense...) était incongru.

Ici, en somme, on ne parle pas gros sous : on goûte, on aime, on adhère, donc on achète... Avec la conviction d'avoir acquis une part de rêve... S'il en reste.

Pour l'amateur qui peut aimer le vin sans disposer de crédits illimités, pour le simple particulier en somme, la question est pourtant loin d'être tranchée aussi facilement : Combien mettre dans un vin? A quoi se fier? A qui ? Pourquoi la moindre bouteille vaut-elle 6, 7, 8... 15 euros, à la propriété?

Quel particulier viendra dans le Languedoc ou le Roussillon acheter une "D18" d'Olivier Pithon 32 euros, une "Valinière" de chez Barral 40 euros... Et la "Petite Sibérie" d'Hervé Bizeul plus de 160 euros... Alors "qu'il ne s'agit même pas d'un Bordeaux ou d'un Bourgogne"?

Plus prosaïquement : qui viendra ici, au fin fond des Corbières, dans la Vallée du pays de Paradis, débourser 11 ou 12 euros pour une Bégou, aussi délicieuse soit-elle, lorsque le français dépense en moyenne moins de 3 euros pour une bouteille de vin?

Voilà la question que je posais ce jour là à mes amis, moi qui avais fait le déplacement avec plaisir et repartirais sans doute avec une caisse ou deux sous le bras...

Le silence qui suivit fut éloquent.

Reprenant la parole, Jean-Baptiste Senat, volontiers politique, évoqua le sociologue italien Carlo Petrini et sa théorie du "consommateur éclairé" sans lequel "le pari d'une agriculture paysanne serait vain". Autrement dit : il faut savoir comment le raisin puis le vin sont faits, combien il en coûte de respecter la nature et le terroir jusqu'au chai, pour apprécier une bouteille à sa juste valeur.

On me reparla du coût du travail... De l'abence de désherbants et de machines à vendanger, des efforts à faire pour éviter "la pente industrielle".

Frédéric Palacios me parla ensuite millésime, saisons, pénibilité, du coté aléatoire et des risques du métier. Puis il embraya sur le coût exponentiel des "produits secs" (verre, bouchons et autres étiquettes qui représentent plus d'un euro par bouteille), des analyses, du passage d'un éventuel oenologue...

Enfin Jean-Baptiste enfonça le clou :
"Si nous vendons les vins à ces prix là... Et 9/10 euros, c'est pas exagéré pour une entrée de gamme, c'est parce qu'il est tout simplement impossible de faire moins cher. En Languedoc, moins de six euros sans tricher, je n'y crois pas. C'est pourquoi je crois vraiment qu'il faut éclairer le consommateur, l'emmener dans les vignes, pour qu'il comprenne le travail que cela représente".
Devant la vigueur de leurs arguments (et l'odeur flatteuse du verre que me tendit Maxime à cet instant), je décidais de réfléchir un peu... J'en concluais également que le sujet était loin d'être clos, qu'il valait bien un petit sondage (colonne de gauche). Et sans doute un long débat.

Droit de Réponse: Domaine Olivier Père et Fils

Après une rencontre désastreuse avec le domaine bourguignon Olivier Père et Fils sur la Salon de Vignerons Indépendants de Strasbourg (lire ici), je me suis empressé de faire un courrier détaillé à Antoine Olivier (le fils), gérant du domaine.

C'est avec surprise et satisfaction que j'ai reçu aujourd'hui un email d'Antoine. Dans sa réponse détaillée, il a su faire part de professionnalisme et même de compassion. Les détails de l'échange resteront bien sûr confidentiels (je ne conçois Internet comme un lieu pour régler ses comptes dans les moindres détails), mais sachez que l'image du domaine en sort grandie. La nouvelle génération a les pieds bien sur terre et a décidé à s'engager dans la "rupture" (un mot décidemment à la mode !) avec une certaine image arrogante et ancienne garde de la Bourgogne.

Esperons que ces bonnes résolutions soient mises en pratique dès l'année prochaine en faisant représenter dignement le domaine par Antoine.

Atteca : vanille, anis et muscle !


Atteca est le résultat de vieilles vignes de Garnacha qui profitent du soleil d’Aragón. Ce terroir du nord est de l’Espagne, au climat aride, produit habituellement des vins capiteux*. C’est le cas de l’Atteca de l’appellation Calatayud! Du haut de ses 15% d’alcool, ce rouge concentré et coloré offre des arômes de fruits mûrs, de vanille et d’épices. En bouche, c’est explosif avec la vanille toujours présente en rétro*!

Je l’ai passé dans l’aérateur à vin Decantus pour polir ses tanins. Superbe rouge que je conseille à tous les amoureux de vins musclés qui ont aussi ce côté « chêne neuf ». Je le suggère avec un rôti de palette à l’anis étoilé. Celui de Josée Di Stasio est succulent!

*Le vin capiteux est celui qui a de la matière, de la richesse et une puissance alcoolique.
*Rétro : la rétro olfaction, de façon très concise, est la perception des arômes par la bouche.


Hélène Dion
Sommelière conseil

Atteca – Vieilles vignes – Calatayud 2009
Code SAQ : 10856873

Prix : 20,50$

Les résultats hebdos et un nouveau sondage….

La première semaine du sondage du blogue Le Tire Bouchon a connu un succès respectable avec plus de 20 personnes ayant répondu à la question suivante : « Quel est le pays duquel vous achetez le plus souvent votre vin? ».

Les résultas sont les suivants :

55% la France

30% l’Italie

15% l’Australie

0% Canada

0% Chili

Je ne suis pas étonné de ces résultats qui reflètent une certaine réalité. Les gens ont une certaine fidélité envers la France et l’Italie. Il y a peut être une méconnaissance des produits canadiens car il y a de très bonnes choses. J’aurais peut être pu ajouter une catégorie autres car il y a surement de bons consommateurs de vin argentins et espagnoles car ce sont des pays en émergeance. Je vais essayer de faire attention à la suggestion des choix réponses à l’avenir.

Le nouveau sondage cette semaine porte davantage sur la somme d’argent que vous consacrée habituellement dans l’achat de vos bouteilles de vin. Il y a les choix suivants :

Moins de 10$

Entre 10 et 15$

Entre 15 et 25$

Entre 25 et 40 $

Plus de 40$

N’hésitez plus vous avez jusqu’au dimanche 4 mars pour voter!

En terminant, notre compteur affiche plus de 200 personnes pour la première semaine d’affichage de cet outil permettant de mesurer le niveau d’achalandage du blogue. Je suis content de voir qu’il y a bien des amateurs qui passent par mon blogue pour s’informer sur le monde du vin. Continuez d’en parler, cela me motive à placer d’autres articles.

Je profite surtout de la fin de semaine pour publier et préparer mes chroniques!

À votre santé!

10 H ASSEMBLAGE AU CHATEAU DE VILLEGEORGE

C’est une semaine, jour pour jour et heure pour heure après celui de La Tour de Bessan, que nous réalisons l’assemblage de Villegeorge.

Nos deux conseillers : côté vin, Jacques Boissenot et côté vigne, Jean Cordeau sont là. Ce sont tous les deux de jeunes retraités, pleins d’enthousiasme, et heureux de se retrouver. Notre équipe est la même que la semaine dernière, mais aujourd’hui, le maître des lieux, c’est Jean-Denis.

La dégustation a lieu dans notre belle salle, décorée des œuvres de Marie Bendler et du beau tableau de ma sœur Brigitte, cadeau de notre équipe du marathon.
Les essais d’assemblage s’alignent les uns à côté des autres après la revue de l’ensemble des lots dégustés en silence. Notre conseil fait l’unanimité, quelques lots sont tangents, mais au fur à mesure des assemblages, le Villegeorge 2010 apparaît fidèle à lui-même : élégant, harmonieux, la finale se construit et la structure apparaît lorsque l’on ajoute du vin de presse. Ca y est stop! Ne cherchons plus : nous aurons à peu près le même volume que l’an dernier malgré le faible rendement. La qualité est bien au rendez-vous.

Avant de se quitter, nous finalisons le second vin, plus souple et plus fruité, il sera élevé en cuve contrairement à son aîné dont les tannins s’arrondiront en barriques.
Nous dégustons les 2009 qui vont bientôt être mis en bouteille : Mars pour le second vin et Mai pour le premier.
Deux grands millésimes qui se suivent : quelle chance !